Market Insights : Accélérer l’accès aux solutions énergétiques hors réseau

3rd Mar 2023 | Leave a comment | By Gilles Vaes

Organisé en Égypte à la fin de l’année dernière, La COP27 a été l’occasion de réaffirmer la responsabilité commune des pays de l’OCDE à fournir l’aide financière et matérielle indispensable aux nations en développement pour qu’elles s’adaptent aux effets du changement climatique et minimisent leurs futures émissions en poursuivant la réalisation des objectifs de développement durable des Nations Unies (ODD).

L’urgence de la situation est des plus claires. Des inondations massives dévastent les pays d’Asie, des sécheresses, tempêtes et feux de forêt ont ravagé l’Europe, l’Australasie et le continent américain et des événements météorologiques violents touchant l’Afrique sont de plus en plus fréquents. Cela représente beaucoup de catastrophes à absorber.

À la lumière des efforts déployés ces trente dernières années pour remédier au changement climatique, Christina Figueres, ancienne Secrétaire Exécutive de la Convention Cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (2010-2016), a récemment déclaré que « la lutte contre le changement climatique n’est pas une question d’espoir, mais de décisions, de choix et de courage. C’est faire ce qui doit être fait »[i].

Elle a tout à fait raison.

Cependant, l’espoir va souvent de pair avec le courage, et cet espoir est nécessaire pour faire évoluer les choses et inspirer l’action. J’aimerais donc profiter de cette occasion pour mettre en avant certains projets transformationnels qu’InfraCo Africa, la branche de développement de projet du Private Infrastructure Development Group (PIDG), a entrepris dans le domaine de l’énergie hors réseau, en Afrique subsaharienne, faisant bon usage des fonds d’aide publique au développement.

Qu’est-ce que l’énergie hors réseau ?

L’accès à l’énergie est un facteur jugé essentiel pour réaliser les ODD des Nations Unies[ii]. Pourtant, 48 % de la population en Afrique subsaharienne n’ont toujours pas accès à l’électricité[iii]. Dans son rapport Africa Energy Outlook Report 2022, l’Agence internationale de l’énergie a révélé une statistique frappante : « Assurer l’accès à l’énergie moderne pour la population africaine nécessite d’investir 25 milliards USD par an, une somme équivalente au coût de construction d’un seul grand terminal de gaz naturel liquéfié». Cela souligne l’importance de redoubler d’efforts en faveur de l’accès universel à une énergie propre, et prouve que cet objectif est à notre portée collective[iv].

La construction d’infrastructures d’énergie renouvelable connectées au réseau (hydroélectricité, géothermie, éolien et solaire) est coûteuse, prend de nombreuses années à se concrétiser et peut également être entravé par un réseau instable et une infrastructure de distribution limitée. InfraCo Africa reconnaît que ces grandes installations énergétiques sont fondamentales pour le mix énergétique futur de l’Afrique, nous soutenons à ce titre une série de projets d’énergie renouvelable hors réseau à travers l’Afrique subsaharienne. Nous expérimentons également l’utilisation de systèmes de stockage par accumulateur à capacité industrielle pour surmonter les difficultés liées à l’intégration au réseau des énergies renouvelables intermittentes.

Nous pouvons aussi agir avec plus d’agilité pour accélérer l’accès à une énergie propre. En déployant des systèmes domestiques d’énergie solaire et des micro et mini-réseaux dans les zones reculées ou difficiles d’accès, les raccordements s’établissent plus rapidement et à moindre coût que ne le permettrait le réseau traditionnel. Outre la réduction des émissions générées par les groupes électrogènes diesel et les lampes à pétrole, l’accès à l’énergie solaire permet également de gagner du . De plus, un accès bien géré peut renforcer la résilience aux chocs climatiques futurs.[v]

Un démarrage modeste

À quoi donc ressemblent les systèmes hors réseau sur le terrain ? Ils se présentent sous des formes très variées : il peut s’agir de systèmes solaires individuels et d’installations en toiture, ou de grandes installations autonomes avec des systèmes modernes d’accumulateurs de secours qui alimentent des milliers de raccordements. Il y a plus de 10 ans, InfraCo Africa a développé un mini-réseau novateur dans le cadre du projet Kalangala Infrastructure Services en Ouganda. Cette installation solaire hybride de 1,6 MW a permis à plus de 4 000 foyers de l’île Bugala, isolée du réseau de l’Ouganda continental, d’être alimentés en électricité[vi]. Pour les habitants de l’île, l’impact de cet accès à une énergie propre a été considérable. En effet, grâce à une électricité fiable, les produits de pêche et agricoles peuvent être maintenus au frais et conserver plus longtemps leur valeur marchande, les commerces peuvent rester ouverts plus tard le soir, et l’hôpital fonctionne à toute heure du jour et de la nuit.

Maximiser l’impact

À lui seul, l’accès à l’électricité ne permet pas de maximiser l’impact positif sur le développement. Au Kenya, grâce à notre projet KUDURA Power East Africa, des particuliers et des entreprises ont pu profiter de solutions de microfinancement pour l’acquisition d’appareils électroniques. Un modèle commercial durable est ainsi établi, en garantissant que l’impact de l’énergie est optimisé au niveau individuel. Forts d’un accès à une énergie propre et à des appareils électroniques abordables, les individus sont en mesure de créer et élargir des entreprises telles que des boutiques, des moulins et des salons de coiffure. KUDURA étudie également l’intégration de systèmes de purification et de pompage d’eau aux mini-réseaux pour favoriser une meilleure santé dans les communautés mal desservies.

Le projet Equatorial Power est un autre exemple de l’utilisation productive de l’énergie qu’encouragent les unités hors réseau. Avec l’appui d’InfraCo Africa, Equatorial Power étend son modèle innovant au Rwanda et en République démocratique du Congo (RDC). Le projet a permis de créer des centres de transformation agricole équipés d’installations de séchage, de réfrigération et de production de glace afin que les exploitants agricoles puissent ajouter de la valeur à leurs produits, minimiser les pertes et augmenter leurs revenus.

Cette attention portée à la sécurité alimentaire se retrouve également dans notre projet Bonergie Irrigation, qui vise à remplacer les pompes d’irrigation au diesel par des systèmes solaires afin d’augmenter les rendements des exploitations agricoles au Sénégal. Le soutien d’InfraCo Africa permet à Bonergie d’augmenter le volume de ses activités en installant jusqu’à 2 000 nouveaux systèmes d’irrigation à l’énergie solaire, et 500 systèmes d’irrigation goutte à goutte.

La société examine également la possibilité d’offrir des solutions commerciales et industrielles pour complémenter l’alimentation du réseau. Elles permettraient d’éviter toute répercussion négative d’une panne ou d’un incident sur la productivité ou la rentabilité d’industries telles que l’agro-transformation et les chaînes du froid. Une fois éprouvés, ces modèles devraient occuper une place privilégiée pour attirer d’autres investissements du secteur privé, afin d’offrir un accès à l’électricité aux exploitants agricoles, aux particuliers et aux professionnels dans l’ensemble de la région.

Accélérer l’accès

C’est cette accélération vers l’accès que nous devons développer. Un système solaire domestique individuel ou un mini-réseau ne sont pas sans effet, mais nous devons déployer des solutions hors réseau à grande échelle si nous souhaitons enclencher une « révolution verte » sur le continent, dans les délais exigés par l’Accord de Paris.

À cette fin, InfraCo Africa a élargi ses horizons en étoffant son portefeuille de projets tels que le projet  Mini-grid en Sierra Leone. Ce dernier a récemment achevé le déploiement d’un mini-réseau pour apporter l’électricité à 40 collectivités des régions australes et orientales de la Sierra Leone, soit plus de 13 000 entreprises et particuliers.

Nos ambitions ne connaissent pas les frontières. InfraCo Africa continue d’investir dans des initiatives audacieuses panafricaines telles que Bboxx, une entreprise de services publics de nouvelle génération qui œuvre à accélérer la fourniture d’énergie propre dans les nouveaux marchés en Afrique subsaharienne, au bénéfice de milliers de personnes.

Mobiliser les fonds

Malgré la baisse du coût des panneaux solaires ces dernières années et les importants progrès technologiques réalisés dans le secteur du stockage par accumulateur, les promoteurs peinent souvent à attirer les financements traditionnels, en particulier sur les marchés frontières. Avec le soutien de nos propriétaires, à savoir les gouvernements du Royaume-Uni, des Pays-Bas et de la Suisse, le mandat unique d’InfraCo Africa nous permet de tester de nouveaux instruments financiers, de supprimer le facteur risque de ces investissements et d’attirer dans le secteur des fonds supplémentaires de développement, qu’ils soient privés ou institutionnels.

À cette fin, pour étendre notre projet Mini-grid en Sierra Leone, nous avons récemment annoncé la mise à l’essai de la Facilité universelle pour l’énergie (FUE), l’instrument innovant de financement basé sur les résultats de SE4All. Nous espérons que ce projet identifiera le potentiel de l’instrument pour soutenir le déploiement de mini-réseaux plus importants, en nombre et en ampleur, à travers le continent.

Le développement des marchés de capitaux est également crucial pour débloquer les investissements institutionnels provenant de fonds de retraite et d’assurance dans les actifs énergétiques hors réseau. Nous pensons que notre soutien de mécanismes de garanties tels qu’InfraCredit Nigeria, une nouvelle société de garanties au Kenya, rassureront les investisseurs et les encourageront à s’engager dans des classes d’actifs moins familières, en mobilisant les financements en devises locales dont les projets hors réseau ont tant besoin. Par l’intermédiaire de son mécanisme de financement mixte appuyé par le FCDO, InfraCredit Nigeria offre déjà des garanties pour l’émission d’obligations par les promoteurs de mini-réseau du pays.

Quel avenir pour l’énergie hors réseau ?

La Banque mondiale et l’ESMAP ont récemment publié le rapport 2022 Mini-grids for Half a Billion People (Des mini-réseaux pour un demi-milliard de personnes), un document de référence pour les décideurs du secteur. InfraCo Africa est fière de figurer parmi les trois investisseurs les plus actifs au monde dans le secteur des mini-réseaux.[vii] Nous sommes déterminés à poursuivre notre engagement actif dans le secteur, en mobilisant les fonds des contribuables des pays développés pour fournir un accès indispensable à une énergie propre et attirer d’autres investissements dans le secteur florissant de l’énergie hors réseau.

L’Afrique dispose aujourd’hui des compétences et de la technologie nécessaires pour développer rapidement le secteur de l’énergie hors réseau sur le continent, et les promoteurs ambitieux désireux de relever le défi ne manquent pas. Les gouvernements commencent à octroyer aux énergies renouvelables hors réseau une place privilégiée au sein de leurs stratégies de planification énergétique, et les donateurs recherchent des moyens innovants pour soutenir ces stratégies. Des organismes professionnels dédiés tels que Mini-Grids Partnerships, Mini-Grids Finance Group, Africa Mini-grid Developers Association et l’Alliance for Rural Electrification occupent également une position de plus en plus forte. Le plus prometteur à mes yeux est la reconnaissance croissante que les systèmes solaires hors réseau peuvent appuyer des solutions plus holistiques pour des domaines tels que la mobilité électrique, l’agriculture et la sécurité alimentaire, l’entreposage frigorifique, le commerce et la logistique à travers l’Afrique subsaharienne. Citons l’exemple récent du projet Mawingu qui devrait fournir un accès à Internet haut débit grâce à des tours de télécommunications alimentées à l’énergie solaire. Cette approche holistique soutiendra l’Accord de Paris en contribuant à un développement économique durable et à la réalisation des Objectifs de développement durable des Nations Unies. Cela nous donne véritablement de l’espoir, et le courage d’en faire encore plus !

L’énergie hors réseau n’est qu’une petite partie du travail auquel mon équipe consacre son expertise et son enthousiasme. Pour en apprendre davantage, veuillez vous rendre sur notre site Web ou nous contacter à l’adresse info@infracoafrica.com

[i] https://www.youtube.com/watch?v=N4pA_owYk2c

[ii] https://energypedia-consult.com/sites/default/files/dateien/Energy%20and%20the%20SDGs%20-%20energypedia%20consult%20Oct%202016.pdf

[iii] https://donnees.banquemondiale.org/indicateur/EG.ELC.ACCS.ZS?locations=ZF

[iv] https://iea.blob.core.windows.net/assets/6fa5a6c0-ca73-4a7f-a243-fb5e83ecfb94/AfricaEnergyOutlook2022.pdf

[v] https://practicalaction.org/news-media/2022/02/04/links-between-energy-access-climate-adaptation/

[vi] https://www.kis.co.ug/pages/view-page/Power-Services

[vii] https://www.esmap.org/Mini_Grids_for_Half_a_Billion_People_The_Report

Gilles Vaes

Gilles a quitté son poste chez Engie pour rejoindre l’équipe d’InfraCo Africa. Au cours de sa carrière, il a accumulé 20 ans d’expérience dans le secteur privé, au sein de l’industrie manufacturière et de l’énergie. Son expertise s’étend de l’ingénierie au développement des activités et des projets, en passant par la stratégie, le développement d’entreprise et les investissements. Gilles est passionné par l’élaboration de modèles socio-économiques qui améliorent le niveau de vie sans compromettre la viabilité écologique.

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