Market Insights : Reproduction d’un succès dans le secteur du transport maritime

28th Sep 2023 | Leave a comment | By Rodney Seema & Salome Gichia

Au sein de l’équipe de gestion d’actifs d’InfraCo Africa, notre rôle est unique et nous permet de nous investir dans l’ensemble du cycle de développement des projets ; de la phase de financement et structuration, en passant par la construction jusqu’à l’exploitation et la sortie. Nos activités se déroulent dans le cadre de PIDG, une entité plus importante qui nous offre la chance de côtoyer divers projets d’infrastructures variés sur différents marchés, reposant sur un éventail de technologies et dans divers secteurs. Travailler dans la gestion d’actifs pour InfraCo Africa diffère fortement des fonctions d’ingénierie plus classiques, parce que l’impact sur le développement durable est la pierre angulaire de toutes nos activités. Notre travail apporte une contribution positive à la vie des communautés.

Bien que nous travaillions chacun sur différents projets et secteurs, c’est le transport maritime que nous aimerions aborder, alors que nous continuons à développer notre ambition dans ce domaine.

Ouvrir de nouvelles routes commerciales prospères

 Avec le soutien de ses bailleurs, les gouvernements du Royaume-Uni (DFID), des Pays-Bas (DGIS) et de la Suisse (SECO), InfraCo Africa jouit d’une longue expérience dans l’accompagnement des projets de transport maritime sur le lac Victoria. Depuis 2007, InfraCo Africa soutient le projet multisectoriel KIS (Kalangala Infrastructure Services), dont le volet clé est une liaison régulière de ferry entre l’île Bugala et l’Ouganda continental. Au travers de ce projet pionnier, nous avons constaté l’impact transformationnel d’un service de traversier fiable et sûr. Sur l’île Bugala, des entreprises se sont développées ou sont venues s’établir, les habitants,  peuvent désormais vendre leurs produits sur le continent et rentrer chez eux le même jour. La population de l’île profite également des commerçants continentaux venus proposer leurs marchandises ; et les voitures et matériel lourd peuvent être transportés vers et depuis l’île, ce qui était impossible avant l’arrivée des ferries du projet KIS, quand la population locale dépendait fortement des canoës. Maintenant, elle peut aussi accéder plus rapidement aux services du continent, notamment les services de santé.

Outre son travail aux côtés de KIS, InfraCo Africa collabore avec la société logistique Grindrod pour développer un autre projet de traversier sur le lac Victoria : le projet EAMT (East Africa Marine Transport). Ce projet concerne un type de navire encore jamais vu sur le lac qui, avec ses 1 000 tonnes et 96 mètres de long, devrait assurer la liaison entre Port Bell en Ouganda et le port Mwanza en Tanzanie. Le projet EAMT réduira les embarras de circulation et les émissions, le trajet, qui actuellement dure de 3 à 4 jours, sera parcouru en à peine 18 à 20 heures !  L’accès à des services de fret régulier sera extrêmement précieux pour les vendeurs de denrées périssables, très vulnérables aux temps du transport prolongé. Le navire pourra accueillir 19 camions semi-remorques et deux camions plus compacts spécialement conçus, sa conception intégrera également des questions telles que la fatigue des conducteurs ou la sécurité routière.

Côté « gestion d’actifs », notre rôle a évolué, partant de la négociation de contrat de construction auprès d’un constructeur naval kényan expérimenté (SECO Marine) pour nous mener à superviser la construction du navire et des activités de soutien, notamment la formation de l’équipage et l’adaptation des ports. Notre travail a également influencé la conception du navire, avec l’intégration de cabines et zones de commodité séparées pour les membres féminins de l’équipage et les conductrices voyageant avec leur fret, en vue d’assurer la sécurité et la dignité de chaque passager. Le navire devrait être inauguré en 2024, et notre attention se tourne donc vers l’exploitation du projet et Grindrod, chargé de gérer le ferry EAMT sur le lac. Grindrod assurera également la gestion des activités terrestres, notamment l’inspection du chargement, mais aussi le dédouanement, le pesage et le chargement des camions.

Notre investissement le plus récent dans le transport maritime sur le lac Victoria est le développement des traversiers Waterbus à Kisumu, au Kenya. Cet investissement a été réalisé par l’intermédiaire du bras d’investissement spécialisé d’InfraCo Africa.  Après avoir identifié un marché mal desservi, Waterbus exploite aujourd’hui des catamarans sécurisés reliant les communautés kényanes établies sur les rives du lac à celles habitant ses petites îles. Ces catamarans peuvent transporter chacun une centaine de passagers. Ils consomment moins de carburant et sont plus confortables que les canoës équipés de moteurs hors-bord. Ils offrent aux collectivités locales un accès fiable et abordable aux services du continent, afin qu’elles puissent mener leurs activités économiques. Depuis l’investissement d’InfraCo Africa en mars 2022, les traversiers Waterbus ont transporté 500 000 voyageurs en toute sécurité sur le lac. L’accord conclu avec InfraCo Africa permettra de lancer cinq nouveaux navires, dont un premier qui sera mis à l’eau plus tard cette année. Ce navire, après un contrôle technique, est destiné à un nouvel itinéraire ougandais, l’entreprise étendant ses services sur le marché tanzanien.

Surmonter les défis

Premier service de traversier organisé sous la bannière d’un partenariat public-privé, KIS a dû, avec le soutien d’InfraCo Africa, naviguer parmi la réglementation ougandaise afin d’obtenir les bonnes autorisations et assurances. KIS a également surmonté les questions liées à la maintenance des navires, le manque d’installations adéquates dans la région rendant les réparations de routine plus onéreuses et chronophages.

Pour EAMT, la mise en place d’un projet novateur et l’obtention des équipements et matières premières se sont révélées un grand défi, dans un pays enclavé appliquant diverses taxes et procédures d’importation. Les délais nécessaires pour obtenir les équipements peuvent avoir un impact négatif sur le calendrier de construction, un élément de premier plan dans l’esprit du gestionnaire d’actifs.

Waterbus, déjà opérationnelle, a éprouvé des difficultés pour trouver l’équilibre entre l’augmentation du coût du carburant et l’accessibilité du prix pour ses passagers, en particulier dans le contexte économique actuel. La société a également rencontré des difficultés pour accéder à des sites de débarquement isolés sur certaines îles, un défi qu’InfraCo Africa a cherché à surmonter en tirant parti d’un financement par subvention de PIDG Technical Assistance et du soutien d’entités actionnaires. Des quais et zones d’attente seront ainsi construits pour améliorer la sécurité des passagers et l’accès des navires, et pour permettre à Waterbus de continuer à desservir ces itinéraires essentiels.

Aux yeux de Waterbus, construire et entretenir des relations avec les collectivités locales est essentiel pour comprendre leurs besoins. Pour la mise en exploitation des activités d’EAMT, de bonnes relations seront indispensables pour interagir avec les transporteurs de fret et d’autres intervenants souhaitant transporter des marchandises à travers le lac. Le travail ne manque jamais !

Partage des connaissances dans toute la région

Les expériences variées d’InfraCo Africa en matière de transport maritime novateur sur le lac Victoria font que la société dispose d’une légitimité unique pour partager son expertise et en faire bénéficier ses projets.

Construit dans le cadre du projet EAMT, le chantier naval à finalité SECO Marine à Entebbe permettra de construire, entretenir et réparer de grands navires pour le marché général, ce qui était auparavant impossible en Ouganda. Waterbus a sous-traité la construction de la coque de son nouveau bateau au chantier naval SECO Marine de Mombasa, tandis que la plateforme supérieure est réalisée à Kisumu. Ces missions génèrent des emplois locaux, mais améliorent aussi les compétences de l’équipe de Waterbus. Waterbus et EAMT cherchent à partager des espaces de bureau en vue d’économiser des ressources et d’apprendre l’un de l’autre.

KIS travaille avec InfraCo Africa pour intégrer des normes élevées à toutes ses activités, en se formant aux systèmes de gestion anticorruption et en établissant une culture solide de la santé et de la sécurité. EAMT et Waterbus ont reçu un soutien similaire en HSE et en intégrité des affaires, des éléments clés de l’offre d’InfraCo Africa favorisant des entreprises robustes et inclusives, capables d’attirer les investissements futurs pour un impact à long terme. Cette approche vient étayer notre mandat délivré par PIDG de mobiliser le secteur privé et les financements du développement pour les transformer en projets à succès, pour en sortir ensuite et libérer notre capital à réinvestir dans de nouveaux projets.

Un autre domaine dans lequel KIS a influencé nos activités concerne la formation de son équipage, y compris des premières matelotes en Ouganda. Une vingtaine de stagiaires ougandais leur ont emboîté le pas et suivent actuellement une formation à l’institut maritime de Dar es-Salaam. Ils pourront manier le navire EAMT et constitueront une main-d’œuvre compétente pour les autres ferries opérant dans la région., Nous avons pu garantir des stages de formation pratique à bord des navires KIS pour plusieurs stagiaires du projet EAMT. Les autres stagiaires travaillent avec des agents côtiers et des exploitants lacustres dans la région. Un groupe, de six femmes, se forme aux fonctions de matelot de pont et technicien. Certains envisagent d’approfondir leur formation pour occuper des fonctions à plus haute responsabilité à l’avenir. InfraCo Africa œuvre pour encourager les femmes à profiter davantage de ces opportunités de formation. Bien que les tâches diffèrent entre les services de transport de passagers et de fret, les liens entre KIS, Waterbus et EAMT devraient permettre à ces étudiants de disposer de futures possibilités de transferts de compétences et de développement de carrière, au fur et à mesure que le secteur atteindra sa maturité.

Un regard tourné vers l’avenir

Le lancement imminent de notre navire EAMT pourrait changer la donne et transformant le lac Victoria d’une barrière002C à une voie commerciale en Afrique de l’Est. En démontrant la valeur d’un service de traversier régulier ; EAMT, espérons-le, témoignera de la demande et pourra mobiliser de nouveaux financements pour le transport maritime. Des routes et services inédits devraient alors se développer sur le lac, ce qui pourrait transformer le commerce dans la région. Pour Waterbus, le lancement de cinq nouveaux navires et l’ouverture d’itinéraires inédits permettront à la population locale de rencontrer des partenaires commerciaux précieux en toute sécurité.

Au-delà des rives du lac Victoria, InfraCo Africa s’efforce d’identifier d’autres écarts à combler en matière de transport maritime sur le continent. En tant que gestionnaire d’actifs, la principale chose à retenir pour tout projet est : « quel défi commercial tentez-vous de résoudre ? » Dans cette optique, nous soutenons activement des collègues d’Afrique de l’Ouest qui cherchent à identifier les besoins du marché et à chercher des solutions pour répondre aux défis du transport maritime dans leur région.

La considération la plus cruciale pour l’avenir du secteur du transport maritime en Afrique est peut-être la décarbonation. Le transport maritime représente actuellement près de 3 % des émissions mondiales exprimées en équivalent-dioxyde de carbone[i] et le secteur doit composer avec la nécessité de réduire rapidement ce chiffre. L’Organisation maritime internationale (OMI) a fixé un objectif de réduction des émissions du transport international d’au moins 70 % d’ici 2050 (par rapport aux chiffres de 2008).[ii] Construire nos bateaux en respectant les normes les plus strictes d’efficacité de la consommation est un premier pas important, de même que fournir des solutions plus propres pour les transports existants. Toutefois, nous surveillons également les débats dans l’industrie sur les carburants alternatifs et les solutions hybrides, notamment l’adoption de technologies d’entraînement à l’hybride solaire.

En tirant parti de l’expertise accumulée par notre équipe, nos partenaires de projet expérimentés et nos marins formés localement, InfraCo Africa est bien placée pour dynamiser l’accès aux infrastructures essentielles de transport maritime, elle y parviendra en élargissant son impact et en intégrant des normes très élevées de résilience climatique, HSE, d’égalité des genres et d’intégrité commerciale, à travers le secteur du transport maritime en Afrique de l’Est, et au-delà.

[i] Faber, J. et al. (2021), Fourth IMO GHG Study 2020, International Maritime Organization (IMO).
[ii] IMO (2018) Adoption de la stratégie initiale de l’OMI sur la réduction des émissions de GES provenant des navires et activités de l’OMI en cours liées à la réduction des émissions de GES dans le secteur du transport maritime. (Consulté en Sept 2023 dans cet article : https://unctad.org/news/transport-newsletter-article-no-99-fourth-quarter-2022 )

Rodney Seema

Rodney a rejoint l’entreprise après avoir occupé le poste de chef des opérations chez Group Five Construction. Chargé de l’exploitation et de la maintenance des installations énergétiques, il y était responsable des installations solaires et éoliennes connectées au réseau et offrant une capacité totale de 210 MW. Durant ses 10 années d’activité chez Group Five, Rodney a également participé aux activités commerciales et d’approvisionnement relatives aux contrats avec Power EPC en Afrique du Sud, au Mozambique et au Nigeria.

Salome Gichia

Sally est Gestionnaire d’Actifs pour InfraCo Africa. Elle a précédemment  travaillé chez CrossBoundary Energy comme ingénieur d’exploitation. Sally a plus de 5 ans d’expérience dans le secteur des énergies renouvelables ou elle a travaillé dans la construction, l’exploitation et la maintenance de plus de 12MW d’actifs solaires commerciaux et industriels à travers l’Afrique subsaharienne. Sally est titulaire d’un diplôme universitaire de premier cycle en génie électrique et électronique, ainsi que d’une accréditation de technicienne en énergie solaire photovoltaïque agréée par l’EPRA (catégorie T3).

Leave a Reply

Your email address will not be published. Required fields are marked *

Projets liés